Disparition de Roger Planchon.
13 Mai 2009 § Poster un commentaire
C’est avec une immense tristesse que j’apprends ce soir la mort de Roger Planchon.
Au-delà du grand comédien, du fondateur du théâtre de la Comédie, du magnifique promoteur du Théâtre National Populaire de Villeurbanne, c’est à l’homme simple, timide, attentif, disponible, curieux, toujours prêts à soutenir, a expliquer, à écouter, auquel je pense ce soir avec tristesse. C’est à Colette, son épouse, à Stéphane et à Frédéric ,ses deux fils ,que je pense aussi. Et j’imagine l’immense absence qu’ils doivent ressentir ce soir. Car un homme tel que Roger Planchon ne quitte pas la vie sans qu’immédiatement le vide qu’il laisse devienne palpable. Moi qui ne l’ai connut que quelques années, qui ne l’ai plus rencontrés depuis un certain temps, je suis extrêmement touché par sa mort, bien plus que par la mort de certains de mes «proches»parents.
De tous les hommes qui ont accompagné mon adolescence, Roger Planchon fait partie de ceux qui m’ont aidé à me construire, a grandir, à aimer la vie, tant lui-même l’aimait. Il me suffisait de croiser son regard attentif pour savoir qu’il écoutait de tout son être ce que je disais. J’ai eu l’immense privilège d’avoir de longues conversations avec lui, souvent après les représentations au TNP, après des dîners tardifs partagés avec Jean Bouise et d’autres de ses amis. Nos conversations ne portaient que très rarement sur son métier. Ce qui l’intéressait, c’était de pouvoir discuter avec une adolescente des sujets d’actualité et plus particulièrement de ceux qui faisaient l’actualité d’une adolescente. Jamais il ne se moquait, jamais il ne banalisait ce qui pour moi était important. Et pour une enfant timide, peu sûre d’elle, se regard de myope, rapetissé derrière ses lunettes rondes, cerclées de métal, était un réconfort sans nul autre pareil.
C’est à lui, à nos conversations “entre adultes”, que je dois mes choix professionnels, culturelles, politiques. Jamais, au cours de ces conversations, il n’a essayer de me convaincre, de faire du prosélytisme culturel ou politique. Il s’est contenté de m’écouter, parfois de m’expliquer ce que j’avais du mal à comprendre. Et c’est grâce a ses questions, a son attention, que j’ai peu à peu compris ce que pourrait être ma vie si je décidais de la prendre en main, si je me faisais confiance . C’est lui également qui m’a fait prendre conscience de l’importance du bonheur et du plaisir de vivre.
Ce n’est que très longtemps après que j’ai compris le cadeau qu’il m’avait fait, alors que rien ne l’y obligeait, en me consacrant du temps, de l’attention, à des moments où il devait être épuisé de sa journée de travail est préoccupé par des sujets bien plus importants que ceux dont je lui parlai.
Il n’a jamais réussi à me faire aimer le théâtre de la façon dont il l’aimait (mais c’était impossible, lui seul pouvait aimer le théâtre à la folie), il a parfois essayé mais jamais insisté. Par contre, il m’a fait aimer la vie, la fête, la créativité, l’imagination, le spectacle la culture, pas celle de l’industrie, celle de l’artisanat, et de cela je lui serais éternellement reconnaissante.
Adiu Monsieur Planchon…
Joie de vivre!
18 juillet 2008 § Poster un commentaire